Notes sur la musique minuscule |
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En 1991, une
longue interview de Mark Hollis à l'occasion de la sortie de l'ultime album de son groupe Talk Talk,
dans "les inrockuptibles" (numéro de septembre-octobre), indiquait que le plus
important dans sa musique était alors le silence.
Le chapeau d'introduction à l'article (par JD Beauvallet) décrivait le résultat par ces mots qui m'ont marqués durablement :
"dernière étape avant le silence".
Quelle mystérieuse musique pouvait donc constituer le dernier stade de la création sonore avant extinction des feux ?
Je ne le découvris que six ans et demi plus tard, début 1998, en empruntant à mon ami Jérôme Provençal le disque en question,
"Laughing Stock".
Pendant ce temps mon imagination avait travaillé. et "Dernière étape avant le silence" devint le titre de la plus belle musique que
j'entendis en songe, enregistrée sur mon premier album solo ("Le Livre Noir du Capitalisme") dans une version issue de mon souvenir du
rêve.
Sylvain, Juillet 2004 |
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En 1996, en lisant la revue "Octopus", j'appris que le slogan du très sérieux label allemand ECM était : "le plus beau son après le silence". La même année, je me souviens avoir assisté pour la première fois à une tentative de version du fameux morceau "4'33" de John Cage. Pour démarrer son concert solo aux Instants Chavirés de Montreuil, le jeune chanteur bordelais Kim s'est tenu bras croisés devant son micro, la guitare en bandoulière, immobile, pendant des secondes qui ont semblé des heures. Croyant être sommée de se taire de façon hautaine et méprisante, une partie du public s'est mise à siffler. Après un temps que j'estime autour de trois à quatre minutes, Kim a pris le micro et a déclaré : "merci. c'était "4'33" de John Cage". Sylvain, Septembre 2004 |
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La première fois que j'ai entendu parler de cette pièce dite silencieuse de Cage, c'était en lisant un article sur lui dans "Télérama",
quand j'étais encore étudiant. Si ce journal parlait de lui, je suppose que c'était parce qu'il venait de mourir,
ce qui laisse supposer que c'était donc en 1992.
En avril 1998, j'achetais le disque solo de Mark Hollis pour l'offrir à l'occasion d'un anniversaire. Finalement, je restais chez moi
le soir de la fête, alors je décidais de garder le disque, que je trouvais excellent.
Il commençait par dix-huit secondes de blanc, et il se clôturait par environ une minute trente de silence.
Sylvain, Octobre 2004 |
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A noël 1999, je me fis offrir un disque de Giya Kancheli.
J'avais lu dans une revue que parmi les compositeurs post-modernes, on le considérait comme "le maître du silence". En janvier de cette année-là, j'avais lu le compte rendu d'un blind test effectué sur Jim O'Rourke dans la revue anglaise "The Wire". Celui-ci reconnaissait une pièce de Bernhard Günter et John Duncan intitulée "Home, Unspeakable", qui commençait par (selon le journaliste) quatre minutes de sons à peine audibles. Avant de trouver la réponse définitive, O'Rourke hésitait, se demandait si ce n'était pas "un des cinquante enregistrements du 4'33 de John Cage", ou même Francisco Lopez. Un an plus tard, je découvrais enfin la musique de Bernhard Günter. Je fus tout de suite fasciné et séduit. A la même période, un ami proche me prêtait un disque qu'il avait volé mais jamais écouté. Il me disait qu'il s'agissait d'un compositeur que Mark Hollis citait en référence; C'était "Piano, Violin, Viola, Cello", l'une des toutes dernières oeuvres de Morton Feldman. Je découvrais très vite que Bernhard Günter (ainsi que Jim O'Rourke) était un très grand amateur et connaisseur de la musique de Feldman. Sylvain, Mars 2005 |
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Une vraie réflexion sur le silence et la musique est née pour moi à la suite d'une conversation avec le compositeur Damien Bétous
(alors élève de Bertrand Dubedout dans la classe de musique électroacoustique du conservatoire de Toulouse, et future moitié du
radical duo Programme).
Assis dehors durant un concert de rock bruyant, nous sommes arrivés à la conclusion qu'une pièce de musique pouvait chronologiquement se définir ainsi : J'ai un jour trouvé un livre intitulé "Eloge du Silence", par Marc De Smedt. J'en retenais qu'un humain moyen en pleine possession de ses facultés auditives entend les sons aux fréquences contenues entre 20Hz et 16000 Hz (ce qui est faux, car on peut souvent entendre jusqu'à 20000 Hz). Autre remarque retenue : même loin des villes et dans le calme de la nuit, il règne un volume sonore d'environ 20 décibels en permanence. Il y avait aussi l'histoire de John Cage visitant la chambre anéchoïque de l'université de Harvard : il a prétendu avoir entendu deux sons, l'un aigü et l'autre grave. Il lui fut répondu qu'il n'y avait aucun son dans la pièce et qu'il avait simplement entendu son système nerveux (son aigü) et son pouls (son grave). Sylvain, Avril 2005 |
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Le 10 juin 2003, j'ai eu l'occasion de visiter la chambre anéchoïque de l'IRCAM à Paris.
Voici mes remarques : 1) Sensation de léger malaise en entrant dans la pièce. Comme un début de haut-le-coeur, sans doute dû à la perte d'un repère sonore habituel. 2) Conviction que le silence n'est pas complet et qu'on peut entendre un petit bruit mécanique aigü, permanent, à un volume extrêmement faible. 3) Prise de conscience des acouphènes dans mes oreilles : des sifflements aigüs continus dont je n'ai pas conscience en temps normal, mais qui alors semblent très forts. 4) Impression surnaturelle lorsqu'on produit des sons dans la pièce : ils sont aussitôt absorbés, sans aucune réverbération aussi minime soit-elle. Impression de jamais entendu, un peu destabilisante. Conclusion : expérience très intéressante. En 1883, l'humoriste français Alphonse Allais inventa une courte partition entièrement vide : une marche funèbre composée "Pour les funérailles d'un grand homme sourd". En 1960, La Monte Young a conçu une pièce qui consiste à allumer un feu et le laisser se consommer, et une autre qui consiste à lacher un papillon dans la salle de concert et d'attendre qu'il sorte de la pièce. Quant à sa "Composition 1960 #9", il s'agit simplement d'une ligne droite tracée sur une feuille de papier : "C'est à interpréter et c'est donné sans instructions". Sylvain, Mai 2005 |
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La "Symphonie monoton" (1947-61) du peintre Yves Klein comprend un long passage
sur une seule note tenue par des instruments à cordes et une partie silencieuse de plusieurs minutes.
Le premier album du groupe de rock argentin Reynols fut un disque "dématérialisé" : en fait, il n'y a pas de disque. Les membres du groupe estiment que tout le monde possède par conséquent cet album, y compris des gens tels que le Pape, Jim Morrison ou George Bush. Plus tard, Reynols a réalisé un disque (bien matériel, celui-là) en utilisant pour unique source sonore des souffles de cassettes audio vierges ("Blank tapes", disponible sur le label Trente Oiseaux, dirigé par Bernhard Günter). Vladimir Jankelevitch, "Quelque part dans l'inachevé", livre d'entretiens. Voir les magnifiques passages sur le silence, le murmure et la nuit. En 1987, alors adolescent, je regardais à la télévision française les "Victoires de la musique". Le chanteur suisse Stephan Eicher était nommé pour un prix avec son album intitulé "Silence". Il n'a pas été récompensé mais je me souviens clairement avoir été impressionné par le paradoxe du titre. Par la suite, j'ai acheté le disque - qui, à part entre les plages, ne contient évidemment pas une seconde de silence.
1990. Le morceau phare du nouvel album de Depeche Mode ("Violator") est "Enjoy the silence". A
la fin de la chanson, l'impression de silence est représentée et cela donne ceci : trois secondes après
le shunt final, la voix de Dave Gahan revient a capella chanter les mots "Enjoy the silence" ; puis une
seconde après la fin de la réverbération de cette voix apparaît un son percussif aigü, très doux et à
faible volume, dont la résonance dure une douzaine de secondes. Sylvain, Juin 2005 |
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Quand j'ai conçu mon premier album solo, je me suis fixé trois grands principes de départ : 1) S'éloigner le
moins possible de l'évidence du silence, 2) Ne concéder un son que quand il est parfaitement indispensable, 3)
Me ressourcer dans mon identité culturelle et personnelle. Ce premier album, "Le livre noir du capitalisme", commence par quatre secondes de blanc numérique et s'achève par trente-sept secondes sans aucun son. A l'intérieur, le morceau "Le marin rejeté par la mer" débute par vingt-quatre secondes où l'on n'entend quasiment rien (un micro était placé sur le balcon de Joan Cambon, l'ingénieur du son). Mon deuxième album, "Nocturne impalpable", comprend des respirations, des plages de micro-sons, et la fin du dernier morceau, une ultime musique apparaît doucement après environ deux minutes et demie de blanc. Mon disque suivant, "Un autre décembre", musicalement très dépouillé, a une introduction d'une trentaine de secondes où seul un très court passage à faible volume vient interrompre le silence - ce qui a dû provoquer une certaine incompréhension, à l'époque, du côté des bornes FNAC où il était en écoute. Bernhard Günter : "Ce que la musique peut apprendre de la peinture, c'est le silence, l'immobilité, la suspension du temps et l'absence de mots". Mark Wastell, l'un des principaux protagonistes londoniens de la musique improvisée réductionniste, dit s'inspirer du "still art" : de Robert Ryman et Agnes Martin. Les monochromes noirs de Ad Reinhardt : jusqu'où Rothko n'a pas voulu aller. Piet Mondrian, le théosophe. Une recherche de la pureté. Simple. Pure.
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Pourquoi parler de "musiques silencieuses", évident paradoxe ? Parce qu'il s'agit de musiques qu'une personne
non avertie n'entendrait pas en entrant dans la pièce où elles seraient diffusées. N'entendrait pas ou
n'identifierait pas comme musique mais comme silence. Un auditeur averti, attentif, avec un système d'écoute
adapté et situé dans un environnement calme, peut en revanche y décerner une réelle variété de sons et
apprécier leur musicalité.
Les Anglo-saxons ont trouvé un terme pour nommer les musiques à la limite de l'audible : lowercase sound. Soit le son "minuscule", par opposition à majuscule. En Français, on pourrait ainsi parler de "musique minuscule". L'artiste sonore Steve Roden définissait dès 1998 le "lowercase sound" : une musique dotée d'un "certain sens du calme et de l'humilité".
Le 13 février 2004, j'ai voulu exécuter tout seul chez moi la pièce "Composition 1960 #9" de La Monte Young :
"Une ligne droite tracée sur un morceau de papier (c'est à interpréter et c'est donné sans instructions)". J'ai
donc utilisé une feuille blanche de format A3 et j'ai tracé un trait avec un marqueur noir (la feuille étant posé sur
le plancher). Cela a duré une petite dizaine de secondes et j'ai aimé le son produit. Et le résultat graphique m'a
paru comme un tableau abstrait dépouillé à l'extrême.
Le 15 avril 2004 : ma première interprétation en suivant la partition de "4'33", avec l'ensemble 0 : Stéphane
Garin (trombone), Joël Merah (bugle) et Maitane Sebastian (glockenspiel). Une expérience magique. C'était
sans public, lors d'une répétition nocturne au Conservatoire de Biarritz. L'artiste Fluxus George Brecht a conçu dans les années 60 le "borderline art" (l'art limite ?), incluant des "sons diffilement audibles", des "soupirs difficilement perçus (il serait possible de les rater complètement)". La partition de son "Organ piece" contient simplement le mot "organ" (orgue). Son "Flute solo" indique : "Disassembling / assembling" (démonter / remonter). Dans "Solo for violin", il faut juste polir l'instrument. Dans son "String quartet", les musiciens doivent juste se serrer la main. Il est aussi l'auteur d'une pièce pour piano qui consiste à poser un vase sur l'instrument. En passant outre l'aspect délibérément comique de ces oeuvres dans leur exécution publique, on peut remarquer qu'elles ne sont en fait pas réellement silencieuse : poser un vase crée un léger bruit, et même serrer la main de quelqu'un provoque un minimum de son. Mais comment interpréter une partition qui dit "orgue" ?
Pourquoi la musique minuscule (lowercase sound) est-elle apparue ?
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Pourquoi suis-je de plus en plus fasciné par le silence ? La question se pose, on me la pose. En tant qu'auditeur, c'est comme si j'étais en recherche des musique les plus "silencieuses", les moins pourvues de sons, au volume le plus bas. J'en suis à chercher avec une grande curiosité des pièces de silence total. Je suppose que cela existe, évidemment. On me l'a confirmé. Je veux vérifier. Je veux entendre une pièce de musique où il n'y a absolument aucun son. Je veux m'asseoir et l'écouter : constater, savoir ce que cela fait d'écouter cela. D'écouter "rien". Mais un "rien" conçu clairement par son "auteur" comme une pièce de musique. Cela existe, j'en suis persuadé. Je veux savoir ce que l'on ressent en l'écoutant attentivement, avec sérieux et conviction. Est-on hypnotisé par le silence ? Fasciné ? Touche-t-on à une perfection musicale (aucun son ni agencement de sons esthétiquement critiquable) ? Ou bien est-ce tout simplement ennuyeux ? Vide (d'intérêt) ? N'est plus de la musique ? L'attention se porte-t-elle alors les sons extérieurs à la composition ? J'ai déjà entendu des pièces contenant des longs passages de silence, parfois de plusieurs minutes. Que ressent-on ? On reste dans la musique. Cela peut s'avérer très beau. Le moindre son apparu, la moindre note, intelligemment placé, en douceur, constitue un évènement qui peut devenir magnifique. On peut en faire l'expérience avec certains disques du compositeur espagnol Francisco Lopez. Ou bien sur le superbe "Futatsu" de Radu Malfatti et Taku Sugimoto, pour trombone et guitare, au sujet duquel le journaliste et musicien anglais David Toop affirme qu'après trois écoutes, "les silences agissent comme un pouvoir de suspension, un répit qui porte la mémoire du passé sans les attentes du futur" (The Wire, janvier 2004). Et en tant que musicien ? Il me semble que je tends vers un dépouillement sonore de plus en plus accentué. Vais-je vers le silence ? Vais-je vers la fin de la musique ? Mais au fond, qu'est-ce que la musique ? Il faut donc se poser la question, et on se rend bien compte que la réponse est loin d'être évidente. D'après le Petit Robert de 1992, ce serait l'art de "combiner les sons d'après des règles (variables selon les lieux et les époques), d'organiser une durée avec des éléments sonores." Dans cette acception, une pièce sans son ne serait pas musique. On peut objecter qu'un dictionnaire ne donne pas une définition d'expert mais se base sur un savoir empirique et académique. "(...) des pièces de deux minutes consistant à un peu plus que du silence orchestré (...)" (Alan Rich, à propos des plus courtes compositions de Morton Feldman). Sylvain, Octobre 2005 |
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Après avoir quitté Montmartre pour Arcueil en 1898, Erik Satie traversait deux fois par jour tout Paris à pied : depuis sa banlieue sud jusqu'à la butte où il officiait comme pianiste de bar, puis le retour (sans doute la nuit, sans doute aviné). Combien de kilomètres avalés quotidiennement ? Combien de semelles de chaussures usées à ce régime ? D'ampoules aux pieds faute de pouvoir acheter régulièrement de nouvelles paires ?
Mais surtout : Son esprit devait vagabonder. Mais où allaient ses pensées durant ces heures de marche journalières, pendant environ quinze années ? Je n'ai jamais lu d'enquête sur ce sujet. Ce serait probablement un éclairage essentiel sur la vie d'un des compositeurs français les plus influents. Sylvain, Juin 2007 |
Lettre à l'intention de la peintre Aurélie Nemours, rédigée le 27 janvier 2005 |
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Madame,
J'ai vu la rétrospective qui était consacrée à votre oeuvre au Centre Pompidou il y a quelques mois. Ce fut pour moi un tel choc que cela m'a décidé à vous écrire ces mots. De par le titre de votre exposition à Beaubourg, j'ai senti que je serai concerné par votre travail. Même si je ne savais rien à votre sujet ni ne connaissait votre nom avant cela. Dès les premières toiles et dessins, j'ai su rentrer dans votre univers. Involontairement, c'est ainsi que je procède. J'ai remarqué que lorqu'on sort d'une exposition qui retrace l'oeuvre entière d'un peintre et que l'on a pu s'immerger dans son langage, on voit le monde extérieur comme dans ses toiles en sortant du musée. Ainsi j'ai cru voir des de Staël et des Cy Twombly sur les murs du métro, ou des Miro dans le ciel de Paris.
En avançant dans votre rétrospective, j'ai senti votre travail se préciser avec les années, et je me suis trouvé de plus en plus captivé. D'abord décontracté et d'humeur à plaisanter, je suis devenu intrigué, concentré, puis touché. Arrivant dans la dernière salle, j'étais un peu troublé de constater à quel point cette peinture touchait de près à mes préoccupations : pureté, précision, place du vide et du silence, beauté immédiate.
Obsédé par ce que j'avais ressenti, j'ai décidé de voir l'exposition une seconde fois quelques jours plus tard, mais en craignant un peu que l'intensité de la première visite ne s'estompe. Toujours dans l'ordre chronologique, j'ai retraversé votre oeuvre, avec le même intérêt. Vint le moment où je dus faire face à nouveau au "Quatuor" de 1988. Il m'a alors semblé que l'émotion ne se renouvelait pas, même si mon attention était encore fortement aiguisée par ces toiles. Je les observais encore plus longtemps, seul dans la salle. Note : le lendemain de la rédaction de cette lettre, j'apprenais qu'Aurélie Nemours était décédée, le jour exact où j'avais rédigé ce message dans le but de le lui envoyer. Sylvain, Décembre 2005 |
Comment déplacer des montagnes |
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Toulouse, studio CDM, juillet 2005. Le producteur Marc Dubézy sculpte chaque morceau piste par piste. Sur les écrans des ordinateurs les courbes des sons sont comme une chaîne de montagnes qu'il déplace presque à volonté avec ses outils virtuels. Confortablement assis en le regardant faire, je comprends soudain que c'est ici la matérialisation de l'histoire mon nouvel album (Down to the bone) : déplacer des montagnes pour finalement arriver au résultat longuement convoité.
Extraits des notes prises au cours de huit années de gestation tortueuse, hanté par cette préoccupation : faire entrer la musique de chambre et le silence dans les chansons de Depeche Mode.
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Guy Debord |
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Robert Wyatt
Le glitch et l'électroacoustique : Utiliser les sons du silence électronique moderne. Les intégrer dans des compositions mélodiques courtes (deux à trois minutes). Faire évoluer les travaux de Günter vers la mélodie, tirer Ravel et Nyman vers l'électroacoustique silencieuse. Projet Depeche Mode : moi (guitare, voix, orgue à soufflets), V. (batterie), S. (basse, voix, guitare). Instruments : voix, guitare, batterie, basse, orgue à soufflets, trompette ou métallophone, cloches. Tirer les enseignements des musiques modèles mais ne pas les copier. Avoir une approche moderne ou intemporelle. Retenir le sens de la mélodie et la concision de Ravel, Nyman, Satie, et le simplifier. Habiller les morceaux de touches électroacoustiques "silencieuses". Retenir de Günter et Feldman le sens du dépouillement. Günter format chanson ? Feldman pop ? Trouver un ton homogène, trouver le lien. Idée : chercher un ensemble piano-alto-violoncelle (musique de chambre) déjà existant.
Henri Michaux
Stephen & Timothy Quay |
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Jean-Luc Godard
Erik Satie
Stephen & Timothy Quay
Jean-Luc Godard
Robert Bresson |
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Adapter DM en "musique française d'aujourd'hui", avec piano, cordes, instruments à vent et électroacoustique. Instruments possibles : voix, piano, violoncelle, alto, violon, accordéon, trompette, clarinette, vibraphone, vielle à roue, cor. Style : Musique de chambre, simple, épurée, avec longs passages de "silence électronique" (moderne). Bressonien. SC, Mark Hollis, Erik Satie, Rachel's, Cat Power. Stripped down to the bone
Down to the bone Vision de Thurston Moore sur le rock en France : les musiciens inspirés par les philosophes. Gilles Deleuze, Guy Debord, Pierre Bourdieu, Claude Lévi-Strauss, Michel Foucault, Jacques Derrida, Roland Barthes, Raoul Vaneigem, Emil Cioran. Se tenir informé. Musique, arts, politique, sociologie, science, psychologie, tout peut m'aider à situer mon projet musical dans l'époque. Cf. théorie de David Toop : XXe siècle où l'avancée de la création tient au recoupement des informations.
Henri Michaux
Arvo Pärt Rendre à Depeche Mode son aspect musique nihiliste de la fin du XXe siècle.
studio : 2000 francs par jour
prises de son : six jours mixage : quatre jours dix jours : 20 000 francs location du piano : trois jours à 2000 francs : 6000 francs pianiste : 3000 francs altiste : 3000 francs violoncelliste : 3000 francs clarinettiste : 2000 francs accordéoniste : 500 francs trompettiste : 500 francs chanteuse : 4000 francs
In your room : chant, alto, violoncelle, piano, trompette.
1- In your room |
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28 février 2003 : Ecouter le morceau avec Man. Réécouter les originaux et décider de l'orchestration sur chaque morceau. Copier les originaux et les envoyer à Need Windham. Relancer la piste de Sam au piano. Recontacter Lindsay Anderson (lui proposer des arrangements ?). Trouver un financement. Essayer des arrangements sur ordinateur. Avancer la partie électroacoustique. L'obstination de Stanley Kubrik : ne rien lacher tant qu'on n'a pas obtenu le résultat voulu. Les Harmonies Werckmeister : la musique de Mihàly Vig passe là où je dois amener Depeche Mode.
Dakota Suite Clogs Threnody Ensemble Man Rachel's Silver Mt Zion Town and Country Set Fire To Flames
Avancement :
Leçon de Pierre Boulez : distinguer ce qui est durable de ce qui ne l'est pas. |
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Projets en cours : Album de reprises de Depeche Mode (juin), pièces pour alto et violoncelle (juin), remix de Pulseprogramming (avril), ACR avec Mark Z. Danielewski (2004), lecture accompagnée avec Félicia (2004), quatrième album de Micro:mega (2004), nouveaux morceaux d'Arca (2004-2005), arrangements et chant pour That Summer (avril / août), DVD sur une lecture de Hubert Selby Jr (juillet).
"Faute de soleil, sache mûrir dans la glace".
Prochain album Sois humble et patient. |
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Comme si c'était Depeche Mode chanté par Mark Hollis accompagné par Rachel's et remixé par Jim O'Rourke. Mettre la version funèbre de Enjoy the silence, avec chant (couplet et refrain, a capella ?) en intro, filtré en aigü. Rajouter une version électroacoustique : (Enjoy the) Silence, en "musique minuscule". Tendre vers mes préoccupations actuelles : parties instrumentales, silences relatifs, électroacoustique minimale (être moderne, penser à Programme, à l'esprit des pionniers). Mixage chez Joan : réécouter Mark Hollis, Rachel's, David Sylvian (Blemish), Gastr Del Sol (Camoufleur, Upgrade and afterlife). Ajouter / personnaliser : électroacoustique, field recording, versions au dictaphone / cd de répétitions, instruments (orgue, harmonium, guitare, vibes).
Mark Hollis (s/t) Gastr Del Sol (Camoufleur) David Sylvian (Blemish) Expliqué hier à Hervé Boghossian mon projet de disque Down to the bone. Boghossian : "Ah ! Tu fais ton Camoufleur." Remarque : sur Upgrade and afterlife, Grubbs et O'Rourke se sont bien entourés de Tony Conrad, Günter Müller, Ralf Wehowsky, Kevin Drumm, Mats Gustafsson et John Mc Entire, entre autres.
Gastr Del Sol
Ce qui doit compter avant tout est la bonne réalisation de cet album.
D'où vient Down to the bone ?
Mark Hollis
Rachel's : Handwriting, Music for Egon Schiele Perturbations des mélodies avec Anthony Taillard (guitare préparée), Philippe Maynard (guitare acoustique), Sébastien Roux (électronique). Indications pour le mastering : Mixes réalisés en 44 kHz / 24 bits, Protools files sd II, CD-Rom ou DVD-Rom, Interleaved files / split files. Voix avec micro Neuman M49 à lampes (de 1950) + préamplificateur Fearn à lampes + compresseur API avec Aural Exciter, Aphex model 602 (de 1970).
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1- Stripped 2- The things you said 3- Blasphemous rumours 4- Death's door 5- Home 6- (Enjoy) The silence 7- Policy of truth 8- In your room 9- Freelove 10- Never let me down again 11- Enjoy the silence Sylvain, Juillet 2007 |